Vincent Wahl - Écrits

9 août 2023 : Je n’en mourrai pas …

Mon assureur décès m’a laissé tomber il y a quelque mois au motif que j’avais passé les soixante-cinq ans. Bon. "Je n’en mourrai pas", me dis-je. Mais mon sentiment de responsabilité (mon épouse, mes enfants, etc..) et même si j’ai déjà une assurance décès causes accidentelles, et même doublée ou triplée dans certains cas, et qui elle, reste ferme comme les mâchoires d’un piège en acier, ça me chiffonne un peu de ne plus avoir d’"assurance-décès toutes causes", comme ils disent. Je fais donc un dossier auprès d’une autre mutuelle (dans l’univers de la sécu à trous, rien n’empêche de cumuler) qui comporte un questionnaire médical, et il se trouve que j’ai, depuis longtemps, plusieurs pathologies à surveiller (à côté de ton corps, jamais, jamais, ne t’endors !). Et voilà qu’on m’en diagnostique une nouvelle, pas si petite, mais bien circonscrite. Si je me soumets bien à ce que me recommande le corps médical, je n’en mourrai pas. Enfin, qui sait ? Guérison à 90% et dans les 10% restants, j’ai encore""une cartouche à tirer", comme ils disent. Je me doute bien, nonobstant, que cet optimisme ne vaut pas pour mon dossier. Je crains qu’on me propose de fortes surcotisations que mon sentiment de responsabilité déjà cité me poussera à accepter, ou même que l’assureur exclue tous les vrais risques, n’acceptant d’assurer que des éventualités aujourd’hui très peu probables chacune, quoi que si on les additionne…. Finalement, l’assureur décès décide de me faciliter la tâche et refuse en bloc. Contrairement au dossier, je n’en mourrai pas, et d’autant moins qu’il m’ôte ainsi de plusieurs doutes et dilemmes, substances hautement pathogènes ! Mais voilà que la conseillère de la mutuelle m’appelle pour me le dire. C’est une gentille attention. A peine m’a-t-elle annoncé avec précaution ce qu’elle considère comme une triste nouvelle, qu’elle poursuit : " l’autre jour, je vous avais parlé de notre offre d’assurance obsèques, avez-vous réfléchi, voulez-vous la souscrire ?" Quelque chose doit heurter ma sensibilité car je me récrie : "eh, je ne suis pas encore mort !" "Non, non, bien sûr", me dit-elle, mais plus on attend, plus c’est cher, alors je vous en parle! "Je crois que je ne fais que répéter : "je ne suis pas encore mort !" Alors, elle: "bien-sûr, il faut positiver!"